vendredi 18 novembre matin (résumés)

Les mouvements généraux chez le nouveau-né et chez le fœtus

Animateur : Dr Roger Vasseur ; Co-animateurs  : Dr Christine Vassel ; Dr François Farges.

Les mouvements généraux, fenêtre sur le fonctionnement cérébral, un marqueur du développement de la vie prénatale jusqu'aux mouvements volontaires.
Christine Vassel, pédiatre

 On entend par mouvements généraux une activité motrice spontanée du fœtus et du bébé dans les premiers stades du développement. Ces mouvements apparaissent très tôt, dès la 8ème-9ème semaine d'âge post-menstruel et persistent jusqu'à 4 mois- 4 mois et demi post-terme. Ils intéressent toutes les parties du corps et précèdent les mouvements volontaires. 
Le Docteur Christine Vassel, pédiatre,en décrira les caractéristiques, l'évolution, les modalités d’évaluation et ce en quoi ils sont un marqueur du fonctionnement cérébral.
L’étude des mouvements généraux permet le repérage des troubles du neurodéveloppement, en particulier dans les populations d'enfants à risque, prématurité, faible poids de naissance, souffrance fœtale à terme. 
L'évaluation des mouvements généraux est également décrite dans le dépistage des bébés à risque de trouble du spectre autistique, en particulier dans les fratries d'enfants avec TSA. 
Cette approche est en particulier intéressante pour repérer les enfants ayant un fonctionnement normal, avec une bonne valeur prédictive. 

Place des mouvements généraux dans le développement 
Roger Vasseur
, médecin de rééducation fonctionnelle

Nous situerons la place des mouvements généraux dans le contexte du développement de cette période si particulière qui précède les mouvements volontaires:

- développement des systèmes sensoriels depuis l’émergence des premières boucles sensori-motrices contemporaines de l’apparition des mouvements généraux, jusqu’à leurs fonctions instrumentales, en passant par leurs fonctions archaïques très en lien avec les dimensions émotionnelles
- développement des états comportementaux
- la régulation tonique 
- l’agrippement au milieu humain 
-….
Toutes ces fonctions entretiennent des liens très étroits, les perturbations de l’une entraînant des perturbations des autres.
Elles participent à l’élaboration des schémas sensori-moteurs.
Elles constituent les premières étapes de la construction de l’axe corporel cad une première représentation unifiée des sensations corporelles.
Par ailleurs les mouvements généraux sont un élément de continuité très précieux entre la vie prénatale et la vie postnatale.

Les mouvements généraux : recherche  de critères d’évaluation chez le foetus 
François Farge, gynécologue-obstétricien-échographiste, Service AMP, Groupe Hospitalier Diaconesses-Croix-Saint-Simon

(Texte illustré par de courtes séquences de films d’échographie)

Les contraintes médicales et légales de l’échographie fœtale laissent peu de place à l’étude de l’activité motrice fœtale de base. Elle constitue pourtant le meilleur témoin du développement cérébral et de l’activité psychique et somatique du fœtus à l’origine.
Les mouvements généraux décrits par Prechtl  en 1974 existent in utero mais ont été très peu étudiés chez le fœtus. Suite aux avancées des néonatalogistes dans ce domaine, nous commençons une recherche centrée autour de mouvements généraux ayant pour but d’observer en échographie l’évolution de cette activité fœtale aux différents temps de la grossesse et ainsi apporter notre contribution à la connaissance de la vie fœtale normale et pathologique.Parmi les critères utilisés en néonatalogie, quels seront ceux qui pourront être validés in utero par l’échographie ? Le projet de la recherche est de définir une grille d’évaluation d’acquisition suffisamment rapide et reproductible, qui pourrait  être pertinente en pratique clinique de dépistage.
Par ailleurs, les spécialistes de l’autisme font des corrélations entre les mouvements archaïques observés en échographie et certains comportements chez les enfants présentant des troubles du spectre autistique.  Peut-on observer des mouvements généraux de « mauvaise qualité » in utero ? Ceci aurait un intérêt pour un travail de  prévention et un accompagnement plus précoce.
De nombreuses études scientifiques et cliniques  montrent l’importance de la période in utero pour éclairer la vie somatique et psychique de l’enfant et de l’adulte. L’échographie est la voie d’accès incontournable pour progresser dans cette connaissance.

 Bibliographie :
Hadders-Algra M., « Neural substrate and clinical significance of general movements : An update », Developmental Medicine and Child Neurology, vol. 60, n°1, 2018, p. 39-46.

 Hayat T.T.A, M. Martinez-Biarge, V. Kyriakopoulou et coll., « Neurodevelopmental correlates of fetal motor behavior assessed using cine MR imaging », AJNR, American Journal of NeuroRadiology, vol.39 n°8, août 2018, p. 1519_1522.

Vasseur R. « Les mouvements généraux : un marqueur du fonctionnement cérébral du bébé » dans « Les enjeux de la consultation de développement » collection « 1001 bébés » Erès 2021

Interférences

COV-PERINAT : Le  vécu   périnatal  et  parental durant  la première année   de pères    et  de mères    de bébés    nés   lors  du premier confinement   en  contexte   de pandémie Covid-19
Flora Koliouli

La recherche COV-PERINAT est multicentrique et longitudinale et a pour objectif d’évaluer l’impact de cette crise sanitaire sur le stress parental, la construction du lien parent enfant et le vécu parental durant la première année de vie avec bébé. 128 parents ont été interrogé à trois reprises durant la première année.

Mots clés : COVID-19 – Parentalité– Stress parental – Prématurité – Support social

Bibliographie :
Koliouli, F., & Zaouche Gaudron, C., Bourque, C.J., & Raynaud, J.P. (2022). Parental sense of competence, paternal stress and perceived construction of the relationship with the premature newborn: A mixed method study. Early Human Development. https://doi.org/10.1016/j.earlhumdev.2022.105576

Kuhn, P., Sizun, J., & Tscherning, C. (2020). Accès et rôle des parents en néonatalogie en période d’épidémie COVID-19—Propositions du GREEN de la SFN. Perfectionnement en pédiatrie3(3), 236. DOI : 10.1016/j.perped.2020.07.011

Morisod-Harari, M., Borghini, A., Hohlfeld, P., Forcada-Guex, M., & Muller-Nix, C. (2013). Influence d’une hospitalisation prénatale sur les facteurs de stress parentaux lors d’une naissance prématurée. Journal de Gynécologie Obstétrique Biologie de Reproduction42, 64-70.

Comme des particules fines dans l’air ambiant, les traces du Covid au cœur des maisonnées
Pascale Gustin
Psychologue, psychanalyste en Cabinet libéral et à La Cardère, l’équipe de soins pédopsychiatriques précoces (0-36 mois) à domicile du Centre pédopsychiatrique de jour Charles-Albert Frère - Grand Hôpital de Charleroi - Belgique

Pour certaines familles, la crise du Covid et la crise maturative de la naissance se sont superposées, voire entrechoquées, affectant profondément l’ambiance autour du nouveau-né. Morosité, violence, angoisse, perte des appuis, tristesse et solitude profondes : le climat n’était au beau fixe ni pour les familles ni pour les équipes. A présent que le temps reprend son cours, nous observons les effets de ces interférences sur le développement des tout-petits dont l’environnement s’est avéré hostile. Agissant comme des particules fines dans l’air ambiant, elles touchent insidieusement au façonnement des liens et expériences de vie. Le travail de soins pédopsychiatriques précoces à domicile ouvre l’accès à ces traces présentes au cœur des maisonnées. Comment ces expériences négatives se sont-elles mises en mémoire ? Comment agissent-elles sur le développement du bébé ? Quelle relance engager pour regreffer ces vécus sur un tissu relationnel empreint de vitalité dans le collectif environnant ?  

Environnement technologique et disruption relationnelle
Marie-Claude Bossière, pédopsychiatre

L’environnement technologique s’est considérablement modifié depuis une vingtaine d’années avec la révolution numérique. Sans dénier ses aspects positifs, mais comme pour tout autre « progrès » technique antérieur, ces changements apportent leur lot d’effets toxiques, dont nous ne prenons conscience qu’après leur installation dans nos vies. Les effets toxiques de l’omniprésence des écrans numériques sont maintenant bien documentés, et mettent en danger la relation parent-enfant, dès la maternité. Comment prendre soin de la relation, comment prendre soin du collectif autour du bébé dans ce contexte?<

Entendre, penser, réagir aux interférences contemporaines, un travail au cœur de la prévention mené par Yapaka.be
Claire-Anne Sevrin

À travers un programme de prévention de la maltraitance des enfants (Yapaka.be), comment penser ensemble la sidération, l’enfermement dans lequel chacun a été pris lors de la crise sanitaire, dans une temporalité pandémique qui a rythmé les mouvements en présence ?  Comment penser d’autres interférences contemporaines comme celles liées aux écrans notamment qui s’inscrivent-elles dans une temporalité endémique ?
Le Covid, les écrans, sont des questions contemporaines qui draguent beaucoup d’émotions, de débats, de conflits... Comment développer des outils avec et pour les professionnels qui soient des temps d’arrêts dans le tourbillon de leurs pratiques quotidiennes, des points d’appuis pour tisser le réseau nécessaire autour des familles ? Comment déployer des campagnes de prévention à l’attention des parents pour qu’ils se sentent soutenus dans leur position d’éducation?
Loin des recettes toutes faites et des prescrits normatifs, Yapaka.be colore l’espace social par des outils de formation pour les professionnels, des campagnes grand public et invite collectivement à remuer les idées, la créativité pour environner bébé au cœur d’un vivre ensemble solidaire.

Les familles, mode d'emploi ? 

Familles en contextes
Chantal Zaouche Gaudron

Envisager le développement d’un enfant, c’est bien sûr axer notre réflexion sur la parentalité, les parentalités plurielles, sur la façon dont le ou les parents peuvent répondre – ou non - à ses besoins fondamentaux et le sécuriser. Cependant, l’approche en contextes permet de signifier l’importance fondamentale des conditions dans lesquelles les parents vivent et les enfants grandissent. Autrement dit, si un enfant se développe bien dans le regard des ou du parent qui s’en occupe et en assume la responsabilité : « Le moi, devant autrui, est infiniment responsable » comme le dit Emmanuel Lévinas (1982), cette responsabilité parentale doit se conjuguer avec une responsabilité étatique avec des politiques publiques volontaires, fortes et adéquates.

L'ectogestation un environnement "idéal" pour le bébé ?
René Frydman

Aldoux Huxley a écrit en 1932 Le meilleur des mondes qui nous interpelle sur une société ou l’enfantement se ferait à l’extérieur du corps féminin. JBS Haldane, en 1923, avait appelé cette gestation in vitro l'ectogenèse. Où en est-on sur le plan scientifique un siècle plus tard ? Une trentaine d’équipes dans le monde y travaillent chez l animal pour l'intant : de la bio impression d'un organe utérin au biobag rempli de liquide amniotique artificiel pour les prématurés nés en dessous du seuil de viabilité actuel. Ces recherches concernent le "comment faire?"  alors que c'est plutôt le "pourquoi faire?" qu'il faudrait aborder.

Les techniques de procréation assistée sont (aussi) des techniques de parenté
Jérôme Courduriès

La manière dont est organisé le débat public sur les techniques d’assistance à la procréation humaine conduit à réduire souvent la perspective à leur dimension médicale. Cette réduction est également favorisée par l’orientation des recherches dans ce domaine jusque dans le champs des sciences humaines et sociales. C’est juste, bien sûr. Ces techniques engagent des connaissances biomédicales et reposent sur des techniques médicales thérapeutiques ou palliatives. En cela, elles impliquent la prise en compte du point de vue des médecins, des biologistes, des bioéthiciens dans le débat juridique, éthique et politique. Cependant, ces techniques de procréation assistée sont aussi des techniques de parenté, c’est à dire qu’elles aboutissent non seulement à donner un enfant à des parents mais aussi à modifier la place de chacune, chacun dans le groupe de parenté. C’est relativement explicite dans le code civil puisque la mise en oeuvre d’une assistance à la procréation avec tiers donneurs implique la nécessité d’animer des techniques juridiques spécifiques pour établir des liens de filiation entre les enfants qui en naissent et leurs parents et, au-delà, les parents de ceux-ci. C’est également ce que montrent les recherches menées auprès des familles ainsi constituées, qu’il s’agisse des parents, de leurs enfants, des ascendants ou des collatéraux. 

Inceste : la face sombre de la famille 
Irène Théry

Ma communication portera sur la face sombre de la famille : les violences sexuelles intrafamiliales, et la façon dont l'approche sociologique et historique, si elle prend appui  un "regard éloigné" permet de montrer que le mouvement #MeToo s'inscrit dans une recomposition globale des normes du permis et de l'interdit sexuels, autrement dit de la "civilité sexuelle",  entamée dès les années 1970, et dont il constitue une nouvelle étape.
Deux sujets seront abordés. Le passage du principe de consentement sexuel statutaire de l'épouse  (qui perdure en droit jusqu'en 1990) à la redéfinition contemporaine du viol conjugal comme l'un des plus graves, en particulier dans le contexte des violences par le conjoint ou l'ex conjoint, pouvant conduire au féminicide. Le passage du silence sur la pédocriminalité et l'inceste à la prise de conscience des enjeux majeurs d'âge et de génération dans les violences sexuelles . Sur ce point, je montrerai pourquoi, dans l'inceste par ascendant, le viol est bien plus encore qu'une atteinte à l'intégrité de la personne, une atteinte mortelle à la transmission du langage, en prenant appui sur la notion-clé  de "maitre des significations" empruntée au philosophe et psychanalyste Cornelius Castoriadis.   

Dessiner l'avenir de l'environnement humain des bébés

De la "Commission des 1000 premiers jours" à l’Initiative Hôpital Ami des bébés 
Francis Puech, gynécologue-obstétricien, professeur honoraire, Président de la Commission nationale de la naissance et de la santé de l’enfant 2005-2018

Dessiner l’avenir de l’environnement humain des bébés dépend à la fois de la vision que l’on a des conditions ontologiques de notre place dans l’univers mais aussi de l’organisation des soins et avant de développer ce pourquoi Michel Dugnat m’a invité à parler je dirai un mot de la situation et de la prise en charge actuelle des grossesses et des accouchements dans nos maternités en France, situation extrêmement préoccupante, au point que les medias s’en font régulièrement l’écho.
Toqueville nous rappelait que «Quand le passé n’éclaire plus l’avenir, l’esprit marche dans les ténèbres ».Mais nous ne partons pas de rien, car si dans la deuxième moitié du 20ème siècle ce sont surtout les conditions de sécurité physique qui ont préoccupé les gynécologues obstétriciens, en 2005 avec le Plan de Périnatalité nous avons introduit une notion qui nous a paru essentielle « assurer la sécurité psychique des mamans et des couples et leur sécurité émotionnelle », ce qui a permis d'introduire dans les 4 mots-clés de ce Plan le mot « humanité » le déclinant ainsi : HUMANITÉ, SÉCURITÉ, QUALITÉ, PROXIMITÉ.
Pour des raisons que j'ai déjà développées les résultats n'ont pas été à la hauteur de ce que nous attendions. Il nous faut donc reprendre les points de ce plan qui restent essentiels. La Commission des 1 000 premiers jours est très intéressante mais comme elle le reconnaît, n’a pas suffisamment abordé les conditions de l’accouchement. L’organisation des soins proposés dans une maternité labellisée par l'Initiative Hôpital Ami des Bébés (IHAB) depuis une vingtaine d'années en France aurait pu être intégrée dans ce rapport car elle partage les mêmes objectifs que les 1000 premiers jours : accompagner de manière bienveillante et individualisée chaque parent dès le début la grossesse, à la naissance et lors du retour à domicile et favoriser l’attachement parents-enfants.

Du père empêché au père "bien-traité"
Danielle Rapoport, psychologue, présidente d’honneur de l’Association  «Bien-traitance, formation et recherches»

Les évènements d’un Mai 68 en grève ont vu une curieuse espèce d’ humains envahir l’entrée des écoles maternelles, les services de pédiatrie, les crèches,  les premiers cabinets d’échographie,  tandis que leur présence, jusqu’ici exceptionnelle à l’accouchement, se généralisait  : les pères ! Cinq décennies plus tard, ils seront les premiers à être interdits de présence dans ces mêmes maternités pour cause de COVID….Il est vrai que durant  l’ « Opération pouponnières » et la multiplication des CAMSP qui les avaient intégrés à part entière , rares étaient  les Services de l’aide sociale à l’enfance, ou encore  les Centres maternels, qui donnaient aux pères leur juste place. « Déjà père avant la naissance » ? Nous en témoignerons, en introduction à l’expérience actuelle d’Aire de famille et des Centres parentaux.
 
Du père empêché au père bien-traité : l’expérience d’Aire de famille et des centres parentaux 
Frédéric Van der Borght

L’accueil du père auprès la mère et de l’enfant en centre parental Aire de famille constitue un espace créateur d’un environnement favorable au développement du bébé comme sujet en devenir .
Nous raconterons l’origine et la genèse du concept, son dispositif  clinique, ses bénéfices en terme de prévention précoce, de protection de l’enfance et d’émancipation ainsi que son essaimage sur la France entière. 
En protégeant la triade père -mère-bébé  dès sa vie prénatale dans des situations de grande vulnérabilité psychosociale et de risque, Aire de famille vise à incarner le trait d’union de bien-traitance et à contribuer à un environnement plus humain durable pour les enfants et leurs parents.
 

Dessiner l'environnement architectural, urbanistique et partenarial des bébés

Le degré zéro de l’architecture
Bernard Franjou

Ainsi que je l’ai proposé à Michel Dugnat, j’envisage de titrer ma communication par l’expression «Le degré zéro de l’architecture». L’architecture n’est pas seulement le jeu savant des volumes sous le soleil !  Le degré zéro c’est le point initial d’une pensée qui se cherche et qui évolue, le début d’une progression en deçà duquel rien n’en saurait exister. Le degré zéro de l’architecture c’est ce qui fait de l’architecture une expression propre de la condition humaine, de son altricialité secondaire, de sa mémoire symbolique. Une maison est le lieu où sont élevés les enfants et où se transmet, au moins aux plus petits, la mémoire des générations passées et la parole. Le degré zéro d’une pensée d’architecture prépare l’essentiel à venir à des degrés ultérieurs. S’il est vrai que la pensée d’architecture est toujours l’invention d’un lieu destiné à héberger un type particulier de relation humaine et la protéger du chaos, au degré zéro on se demande encore pourquoi bâtir ? Quelle enveloppe créer et quel contenu envelopper ? Quel occupant ? Quelles en sont les particularités humaines et pourquoi les réunir sous un même toit ? Quelle relation faciliter ? Et si l’on obtient une réponse à toutes ces questions, il restera encore à en déduire les conséquences sur la nature du lieu à inventer. Alors qu’on n’a pas encore songé à construire une maison, le degré zéro c’est la graine à semer, la semence imperceptible. C’est déjà la somme de tous les ingrédients de sa croissance, l’ensemble des déterminants de la forme aboutie, de sa fonction et de sa structure. 

Après la parution du référentiel petite enfance, en 2021 comme partie du code de la santé publique, il m’a paru utile de rappeler le chemin parcouru depuis les diagnostics étiologiques par René Spitz du syndrome d’hospitalisme et des conséquences délétères des carences affectives observées chez des nourrissons accueillis en milieu institutionnel (De la naissance à la parole - 1968). Ce parcours est jalonné par 1/ l’édition de «Loczy où le maternage insolite» de Myriam David et Geneviève Appell en 1973, par 2/ l’ «Opération pouponnières» animée par le ministère de Simone Veil dans les années 70-80, par 3/ la réforme du programme de réalisation architecturale des crèches collectives de la ville de Paris, une émanation du « programme des crèches collectives et familiales » de l’assistance publique de Paris de 1968, dont il m’a été demandé d’initier et de piloter la révision à l’appui de la demande des professionnels de petite enfance et 4/ l’édition par la FNCAUE du « Guide pratique de l’espace d’accueil de la petite enfance » en 1992, une commande du secrétariat d’état à l’action sociale après la promulgation de la loi PMI de 1989.
Cette continuité d’événements annonce l’apparition d’une pensée spécifique portant sur les conditions de l’accueil précoce en milieu institutionnel. La relation quotidienne des membres de l’environnement familier du nourrisson à un âge préverbal apparait alors comme le substrat d’une mémoire commune qui se construit et se partage collectivement pour donner peu à peu matière à l’émergence de la parole. Cette mémoire se nourrit de rythmes et d’habitudes acquises au quotidien, mais elle ne peut encore se confondre avec un projet déterminé. En tous cas elle exige des conditions particulières qui garantissent une confidentialité suffisante, une protection contre les intrusions porteuses de chaos. Disons que de telles perspectives font espérer de retenir les déterminants environnementaux susceptibles de faciliter la construction de la mémoire commune issue des relations humaines et de créer ainsi une matière suffisamment consistante pour nourrir la parole émergente. Sans être encore de l’architecture, cette progression intéresse autant la formation des professionnels de petite enfance que la conception des milieux institutionnels d’accueil précoce, si tant est que la conception du lieu d’accueil en fait pour eux un outil de travail déterminant. 
La mémoire familière est le point nodal d’où l’on déploie le fil directeur de la conception architecturale.  Mon propos est de rappeler les constantes qui s’imposent en tous types de milieu d’accueil précoce, EAJE, crèches, hôpitaux, pouponnières, accueil parents-enfants et qui facilitent la construction préalable d’une mémoire partagée et exclusive d’un environnement humain familier porteur de la parole chez le petit enfant où une professionnelle d’accueil saura s’intégrer pour assurer une continuité pendant les temps de séparation.
L’attachement de l’enfant en est sans doute le phénomène le plus présent. Je propose ainsi de repréciser comment la sécurisation affective de l’enfant est devenue un critère déterminant de la conception de l’espace d’accueil du nourrisson, au même titre que les obligations réglementaires d’hygiène, de sécurité et d’accessibilité. Une telle prise de conscience n’a de sens que si la pratique et la formation professionnelles apprennent parallèlement à développer des méthodes suffisamment efficaces pour obtenir l’adhésion des parents et leur coopération.
J’envisage de préciser également ce qu’on appelle par espace de référence et le concept associé d’unité d’accueil tel qu’il figure maintenant dans le code de la santé publique. Il y a lieu de comprendre comment l’éradication de tous facteurs d’intrusion dans l’intimité familière des unités devient un enjeu d’efficacité relationnelle. Comment il conduit à limiter le nombre d’enfants d’une même unité d’accueil.  Car la lutte contre les intrusions pour préserver les acquis peut conduire à des contresens  comme, par exemple, de réduire la disponibilité des professionnels à l’accueil des parents sur le lieu de vie de leur enfant. Pour passer les degrés supérieurs du concret de la conception il faudra examiner les conséquences spatio-temporelles de chacune des trois formes spécifiques de l’attention portée sur l’enfant aux différents moments de son cycle de vie : 1/ à portée du regard, 2/ à portée de la voix et 3/ à portée de la main, ce qui donne matière à la pensée d’architecture quand elle s’applique à l’accueil d’un nourrisson.
Je souhaite préciser notamment comment l’évidence est venue de différencier des espaces de sommeil et les espaces d’éveil dans le concept d’unité d’accueil, après une éternité de confusion ; comment l’introduction des postes de change ouverts sur les espaces d’éveil rend compatible des moments de relation individualisée et chaleureuse avec un enfant et la nécessaire vigilance sur l’ensemble de l’unité d’accueil. Comment cette disposition permet de mieux répondre aux critères de renouvellement de l’air dans les unités d’accueil, ce qui n’est pas toujours bien compris.
Un exposé sur la conception architecturale des espaces de référence serait improductif sans la mention de leur nécessaire complément qu’on a appelé espace de transition, espace ouvert aux situations non familières. Enfin, il serait également impossible de ne pas mentionner cette autre forme de complétude qui consiste à orienter, cette fois-ci, l’attention sur les adultes en charge d’accompagnement de nourrissons, professionnels ou parents. Cette attention nécessite la création d’espaces complémentaires dédiés au soutien professionnel, espaces dits de transaction. 
Telles sont les propositions de ma contribution d’architecte au symposium "Dessiner l'environnement architectural et urbanistique des bébés".

Un lieu unique pour mieux vivre ensemble. Issy-les-Moulineaux – Hauts-de-Seine
Bruno Jarry

Ouvert à toutes les configurations familiales, l’Espace Andrée Chedid s’adresse aussi bien aux bébés, enfants, adolescents, parents et grands-parents. L’espace conjugue un lieu d’accueil enfant-parents, une halte-garderie, des lieux d’accueil et d’écoute pour adolescents, des structures dédiées aux relations enfants - parents - grands-parents avec un pôle multi-partenarial rassemblant différentes institutions la PMI, la CAF des Hauts-de-Seine mais également des associations locales spécialisées sur la périnatalité et la première enfance (Périnat, Jumeaux et +, Lire et Faire Lire, Arc-en-ciel…).
L’Espace Andrée Chedid se propose également d’impulser et de coordonner pour tous les âges de la vie des animations poétiques, philosophiques et de programmer des spectacles, lectures mises en espace, théâtre d'objets, marionnettes ou contes en complémentarité des équipements et structures de notre Ville.
L’Espace Andrée Chedid s’est également donné pour mission de faire connaître la personnalité et l’œuvre d’Andrée Chedid, la poète, la conteuse, la nouvelliste, la romancière, la spirituelle, la féminine… et des expositions autour de l’œuvre emblématique de cette femme exceptionnelle.
Enfin, l’Espace Andrée Chedid inscrit son action d’accompagnement des publics en situation de fragilités et de vulnérabilités afin de leur permettre de découvrir le monde des cultures dans des conditions adaptées et favorisant ainsi leur épanouissement et leur sensibilité.
Véritable laboratoire des idées, l’Espace Andrée Chedid s’affirme résolument comme le lieu de métissage des savoirs et des champs disciplinaires, un espace des possibles au service du dialogue en famille et de la transmission entre les générations.
Au cours de cette présentation, seront présentés : les origines du projet, la conception de cet établissement avec l’architecte Pierre-Louis FALOCI, les rapports avec les différents instituions, les  aménagements possibles avec les futurs occupants, les actions à destination des futurs parents et des nouveau-nés mais également les limites éprouvées et les obstacles rencontrés.
L’Espace Andrée Chedid se décrit comme une expérience singulière pour les bébés et leurs parents.

 

« Lire aux bébés » et soins en périnatalité : une expérience innovante de lecture d’albums en unité parents-bébé
Estelle Dagon, auxiliaire de puériculture, Agathe Saby, psychiatre, Elise Fidry, psychologue

Depuis 2 ans, une expérience innovante de lecture d’albums en unité parents-bébé à Amboise
vient démontrer la richesse et la complémentarité entre les soins et les propositions
culturelles. La lecture, adressée, d’albums de littérature jeunesse vient faire tiers, ouverture
vers le monde social dans l’univers soignant de la psychiatrie périnatale. Le dispositif articulé
culture/soin semble potentialiser les processus thérapeutiques en cours dans le lien parent
bébé. Nous nous proposons de présenter ce dispositif et de l’illustrer autour de lectures et de
situations cliniques.
Mots-clés : psychiatrie périnatale, lecture d’albums jeunesse, soins conjoints parents enfants,
effets thérapeutiques

 

  

 

 INSCRIVEZ-VOUS

 

 

Personnes connectées : 3 Vie privée
Chargement...